Quelles évolutions suite à l'Ordonnance portant modernisation du régime des FIA ?

Le 3 juillet 2024 marque une évolution dans la règlementation des fonds d'investissement en France avec l'adoption de l'Ordonnance n°2024-662.

En effet, cette nouvelle réglementation, visant à moderniser le régime des Fonds d'Investissement Alternatifs (FIA), introduit quelques changements et simplifications bienvenus tant pour les FIA professionnels que pour les non-professionnels.

Les plus significatifs nous paraissent être les suivants :

1.      Modifications affectant les FIA grand public

a.    Elargissement du champ des actifs éligibles aux SCPI

(i) Les SCPI et leurs filiales peuvent désormais investir dans :

  • « l'installation, la location ou l'exploitation de tout procédé de production d'énergies renouvelables, y compris la revente de l'électricité produite » ; et
  •  les « meubles meublants, biens d'équipement ou biens meubles affectés à ces immeubles et nécessaires au fonctionnement, à l'usage ou à l'exploitation de ces derniers » (article 8 de l’ordonnance).

Cette modification (i) étend le champ des biens éligibles à l’actif des SCPI et de leurs filiales et (ii) permet de diversifier les sources de revenus. Toutefois, le nouvel article L. 214-114 du Code monétaire et financier précise qu’il doit s’agir d’une activité nécessairement « accessoire » pour les SCPI.

(ii) Il est également possible pour les SCPI, sous conditions[1], d’investir dans des filiales constituées sous forme de sociétés commerciales (article 8, II. 3° de l’ordonnance) de type SAS par exemple, dont l’actif est principalement constitué d’immeubles. C’est là une petite révolution puisque jusqu’à présent seules les foncières sous forme de SCI étaient admises à l’actif des SCPI. Il s’agit d’une possibilité attendue depuis longtemps pour faciliter certains investissements hors de France.

b.    Modifications opérationnelles pour les SCPI

(i) Il n’est désormais plus possible de subordonner la conclusion d’opérations, par la société de gestion, à l’assentiment du conseil de surveillance s’il en existe un (suppression de l’alinéa 2 de l’article L. 214-99 du Code monétaire et financier, article 9 de l’ordonnance) : c’est l’autonomie de la société de gestion qui est une nouvelle fois consacrée.

(ii) L’article L. 214-88 du Code monétaire et financier est modifié :

  • afin de permettre la création de parts de catégories, et ce, sous réserve des prescriptions du Règlement Général de l’AMF (lesdites prescriptions ne sont pas encore parues au sein du RGAMF) ;
  • afin de supprimer la valeur nominale minimum de 150€.  

c.   Elargissement du champ des actifs éligibles aux OPCI

Tout comme les SCPI, les OPCI et leurs filiales peuvent désormais investir, à titre accessoire, dans des systèmes de production d’énergies renouvelables : ils peuvent « procéder à l'acquisition directe ou indirecte, l'installation, la location ou l'exploitation de tout procédé de production d'énergies renouvelables, y compris la revente de l'électricité produite » (article 8, IV de l’ordonnance). 

d.   Expert externe en évaluation pour les OPCI constitués sous la forme de SPPICAV et apports en nature : un seul expert désigné nécessaire

L’article L. 214-66 du Code monétaire et financier est modifié et impose la nomination d’un unique expert externe en évaluation, au lieu de deux auparavant, dans le cadre de l’évaluation d’apports en nature (article 10 de l’ordonnance).

L’article L. 214-55 du Code monétaire et financier, relatif à l’évaluation des actifs de la SPPICAV, n’est quant à lui pas modifié et deux experts externes en évaluation demeurent nécessaires.  

e.      Une simplification attendue pour les OPCI : il est enfin possible de libérer ses apports en numéraire et souscriptions d’actions de SPP(P)ICAV par la voie d’une compensation de créances

L’article L. 214-66 du Code monétaire et financier est modifié, l’alinéa 3 relatif à l’impossibilité de libérer ses apports et de souscrire des actions par compensation avec des créances liquides et exigibles étant supprimé (article 13 de l’ordonnance), enfin !

2.      Modifications affectant les FIA professionnels

a.    Emission de titres de créance 

Les FPS et les SLP peuvent désormais émettre des titres de créance, à l’instar de ce que prévoyait déjà l’article L. 214-169 du Code monétaire et financier pour les OFS.

b.    Création de la « SLP Spéciale »

L’article 4, II de l’ordonnance intègre un nouveau sous-paragraphe 4 « Société de Libre Partenariat spéciale » au sein du Code monétaire et financier.

Les caractéristiques principales de la SLP spéciale sont les suivantes :

  • Les actifs éligibles sont ceux de l’article L. 214-154 du CMF (FPS) ; s’agissant des « biens », les conditions d’éligibilité sont désormais réduites au fait que la propriété dudit bien puisse être fondée soit sur une inscription, un acte authentique ou un acte dont la valeur probante est reconnue par la loi ;
  • Les biens mis à disposition de la SLP spéciale, tout comme les revenus tirés de ces biens, sont réputés communs ;
  • La SLP spéciale ne dispose pas de la personnalité morale ; elle doit néanmoins faire l’objet d’une immatriculation au registre du commerce et des sociétés ;
  • Les biens communs mis à disposition de la SLP spéciale répondent des dettes et charges nées de son administration et de son fonctionnement ;
  • Les associés commanditaires ne sont tenus des dettes et charges nées de l'administration de la masse commune et du fonctionnement de la SLP spéciale qu'à concurrence de leurs droits dans la masse commune, sauf s’ils se sont immiscés dans la gestion externe de la société ;
  • La SLP spéciale est administrée par le gérant et peut prendre des engagements sur les biens communs dans la limite de l’objet social ; les actes doivent être conclus sous la dénomination de la SLP spéciale, sans quoi le gérant est tenu personnellement ;
  • Les statuts fixent librement les conditions de répartition de tout ou partie des actifs mis en commun au sein de la société de libre partenariat spéciale, y compris le remboursement d'apports aux associés.  

Naturellement, toutes ces évolutions restent soumises à l’adoption d’une loi de ratification dont le projet devra être déposé devant le Parlement dans un délai de 3 mois à compter de la publication de l’ordonnance.

[1] La responsabilité des associés ou actionnaires est limitée au montant de leurs apports ;   L'actif est principalement constitué d'immeubles acquis ou construits en vue de la location ainsi que des meubles meublants, biens d'équipement ou biens meubles affectés à ces immeubles et nécessaires au fonctionnement, à l'usage ou à l'exploitation de ces derniers, ainsi que tout procédé de production d'énergies renouvelables en vue de la location ou de l'exploitation ou de ces deux finalités, de droits réels portant sur de tels biens, de participations directes ou indirectes dans des sociétés éligibles au capital d’une SCPI (sociétés civiles ou commerciales) ;   Les instruments financiers qu'elles émettent ne sont pas admis aux négociations sur un marché côté.  

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